Les malgré-nous

Dans cet article je vais te raconter l’histoire tragique de ces femmes et hommes enrôlés de force dans l’armée allemande.


22 juin 1940 : Après la défaite française, l’armistice est signé entre le représentant du troisième Reich, Wilhelm Keitel, et celui du gouvernement français, Charles Huntziger. Le cas de l’Alsace et la Moselle n’y est pas évoqué. Ces deux territoires restent donc sous juridiction française même s’ils sont occupés militairement par l’Allemagne.

armistice 1940

18 octobre 1940 : Par un décret signé de la main d’Adolf Hitler, l’Allemagne nazie annexe l’Alsace et la Moselle qu’elle considère comme germanique.

Les Alsaciens et Mosellans sont alors soumis au service militaire. Mais cela relève alors de la simple propagande. Ne voyant aucun résultat, Robert Wagner, le responsable de l’Alsace, propose à Hitler, au printemps 1942, de rendre le service militaire obligatoire.

19 août 1942 : Le responsable de la Moselle annexée, Josef Bürckel, promulgue une ordonnance rendant obligatoire le service militaire. Dix jours plus tard, deuxième ordonnance qui octroie la nationalité allemande aux Mosellans, rendant ainsi applicable cette incorporation de force.

25 août 1942 : C’est au tour de Robert Wagner de publier une ordonnance obligeant les jeunes Alsaciens à se soumettre au service militaire de la Wehrmacht, l’armée régulière allemande.


En temps de guerre, le service militaire consistait à être incorporé dans l’armée régulière et à participer aux combats. La plupart des malgré-nous seront affectés dans la Wehrmacht mais beaucoup de classes seront versées dans la Waffen-SS, dites « troupes d’élite », qui essuyait de nombreuses pertes sur le front de l’Est.

malgré nous

Afin de dissuader les récalcitrants, l’autorité nazie rend responsable la famille. Elle sera tenue responsable du déserteur et pourra être poursuivie et déportée en camp de concentration.

Au final ça sera 100 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans qui viendront grossir les troupes de l’armée allemande.
La plupart seront envoyés en mars 1943 sur le front de l’Est pour combattre l’armée de Staline. Les Soviétiques sont alors prévenus par la France Libre de la présence des malgré-nous. En mai 1943 les autorités soviétiques acceptent le principe de séparer les incorporés de force Alsaciens Mosellans des autres prisonniers sous uniforme allemand.

De nombreux appels à désertion sont alors lancés via des tracts ou sur les radios telles que la BBC, Radio Alger ou Radio Londres.

« Quittez au plus vite les rangs de cette armée étrangère.
Évadez vous, gagnez les lignes russes ou américaines.
En gagnant les lignes russes, vous serez accueillis en amis. »

Appel en dialecte alsacien lancé sur la BBC en août 1943 par Jacques Kalb.


Les soldats déserteurs et ceux capturés par l’Union soviétique seront internés au camp 188 de Tambov à 450 km au sud-est de Moscou. Le « camp des Français », comme beaucoup l’appelaient, internera près de 18 000 hommes qui souvent ne seront pas traités comme des alliés mais plutôt comme des adversaires.

malgré nous Tambov

Dans l’entourage du général de Gaulle mais aussi en Union Soviétique, on lance l’idée de la création d’une brigade Alsace-Lorraine composée des déserteurs et qui combattrait aux côtés de l’Armée Rouge. Mais finalement il sera préféré l’envoi de prisonniers en Algérie pour regonfler les troupes de la France libre. Cette option est acceptée, début mai 1944, par le gouvernement soviétique qui donne son accord pour le rapatriement de 1 500 prisonniers. Engagés dans les rangs des forces françaises libres, certains d’entre eux participeront même aux combats de la libération de l’Alsace.

Les autres seront libérés du camp en automne 1945 mais une partie d’entre eux restera plusieurs années supplémentaires en captivité, les soviétiques les accusant de crimes de guerre.


À leur retour en France les Alsaciens et Mosellans seront considérés comme des traîtres, voire comme des sympathisants nazis. Ils subirent notamment la politique d’épuration à la Libération qui visait les personnes ayant collaboré avec les autorités d’occupation nazies ou considérées comme telles.

Le procès d’Oradour-sur-Glane à Bordeaux en 1953 n’arrangera pas les choses. Douze malgré-nous ayant participé au massacre du 10 juin 1944 seront condamnés à des peines de travaux forcés et un volontaire sera condamné à mort. Dans le compte rendu du procès il est indiqué, entre autres, que
« les incorporés de force devaient s’extraire des unités allemandes ».

L’opinion publique française se divise et face aux demandes de réhabilitation, le Parlement vote une loi amnistiant les malgré-nous le 21 février 1953.


malgré nous mort pour la France

D’après certains historiens, sur les 130 000 incorporés de force, 24 000 sont morts au combat, 16 000 dans les camps soviétiques ou yougoslave, dont 3000 à 6000 au camp de Tambov, essentiellement de dystrophie alimentaire ou à cause du froid. 40 000 d’entre-eux ne rentreront pas.

L’ordonnance du 2 novembre 1945, signée du général de Gaulle, reconnaissait à ces soldats le statut de « victimes » et de « morts pour la France« .

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